lundi 22 décembre 2014

Channel Zero : Interview @ Alcatraz Festival



Après la disparition brutale de Phil Baheux, batteur au sein de Channel Zero, le groupe belge de renommée internationale a dû faire face à de nombreux moments de doute. Un an plus tard, malgré le triste souvenir qui y est lié, les musiciens reviennent à l’Alcatraz pour célébrer la mémoire de leur ami. L’occasion pour nous de RENCONTRER Tino De Martino, le bassiste et de revenir sur cette année difficile, mais aussi d’évoquer les nouveaux projets qui permettent aujourd’hui au groupe d’aller de l’avant.




Isa : C’est un jour un peu spécial pour Channel Zero aujourd’hui, comment avez-vous décidé d’aborder le concert de ce soir ?
Tino : Oui, c’est un jour spécial, en effet. Je crois que, en tout cas personnellement et pour le groupe, que le jour le plus compliqué, ce sera demain, en fait. Demain, ça fait un an exactement. C’est vrai qu’il y a un an on devait jouer à l’Alcatraz et voilà, ça s’est passé… Je crois qu’on a essayé de… On est venu ici en se disant : « On va jouer. On joue pour Phil. On le fait pour lui. De toute façon, il est là tout le temps avec nous, donc on fera comme pour tous les autres concerts ». Mais c’est vrai qu’aujourd’hui, il y a énormément de personnes qui sont venues chez nous en discuter et ça, émotionnellement, c’était assez fort aussi.
Isa : Et au niveau du show, ça s’est passé comment ? Ça a été ? Tu peux me donner tes impressions ?
Tino : Ça a été. En fait, je crois que pour nous, en tout cas, c’est quelque chose qui nous booste, qui nous donne envie de continuer, d’aller en avant et donc… Je sais que pour moi, personnellement, en tout cas ce soir, tout le temps, c’était en pensant à lui : « Putain, regarde ce que je fais ! On y va, on le fait pour toi ! »
Isa : Justement, le fait de continuer la formation, ça rend votre hommage encore plus fort, mais ça n’a pas dû être un choix facile à prendre, de se dire de continuer ?
Tino : Non, bien sûr que non, ça a été extrêmement difficile, en fait. Et pendant un petit temps, en fait on n’y pensait pas du tout au début, pour nous c’était terminé. Et puis bon, c’est vrai qu’à un moment on s’est dit : « Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? On est là tous les trois, qu’est-ce qu’on fait ? » Et c’est vrai que ça peut sonner comme déjà entendu, mais vraiment, je crois qu’il nous aurait botté le cul si on avait dit : « On ne le fait pas, on arrête ».
Eric : Je crois aussi, le connaissant, un homme de coeur comme ça, il aurait dit : « Les gars, vous devez continuer et basta ! »
Tino : Oui et puis de toute façon, ce qu’il y avait c’est que l’album, on avait déjà commencé à le composer avec lui, la pré-production était faite avec lui et on devait, je crois que c’était le 12 août, on devait rentrer en studio avec Phil. Et donc, c’était là. Et ne pas enregistrer cet album, ça ne l’aurait pas fait, en fait, ce n’était pas possible : il fallait qu’on le fasse.
Isa : Mais venons-en, justement, à « Kill All Kings », dans quelles conditions cela s’est passé ? Là, tu viens de le dire, mais concrètement entre vous…
Tino : En fait, ce qu’il y a, c’est qu’on a pris un petit temps avant de recommencer l’enregistrement. On a tout annulé et finalement l’enregistrement s’est fait en novembre, donc quelques mois après. C’était quand même relativement difficile, moi je n’ai pas participé à l’enregistrement des batteries qui se passait à Los Angeles, en fait, moi je l’ai fait en Belgique. Mais je sais, en en discutant et en voyant Francky et Mikey tous les jours via Skype, c’était difficile pour eux. Parce qu’évidemment c’était un autre batteur, donc avec une autre frappe, une autre façon de jouer, aussi et même s’il a respecté un maximum ce que Phil avait composé.
Isa : D’accord. Est-ce que tu sais si l’album est un concept album, ou vous abordez des thèmes différents ? En d’autres mots : est-ce qu’il y a un thème principal à l’album ?
Tino : Non, je pense que… Oui, on pourrait trouver un thème principal qui est le mal-être et les problèmes de société, comme peut-être, je pense, énormément de groupes ont envie d’aborder. De là à l’appeler un concept album, non.
Isa : Ok et est-ce que par exemple, tu pourrais nous expliquer un titre qui te tient plus particulièrement à coeur ?
Tino : Oui, mais tous les titres me tiennent à coeur, donc… Je ne sais pas…
Isa : Alors on peut peut-être parler de « Duisternis », qui est chanté en trois langues, pourquoi ce choix ?
Tino : Pourquoi ce choix ? Eh bien, en fait, on était occupé à enregistrer et Francky avait mis ses voix dessus et… C’est vraiment très con, en fait, on se regardait et on se disait : « Oui, non, peut-être… » et à un moment donné il a dit : « Attendez, j’ai une idée ! Je vais essayer autre chose, je vais essayer de le faire dans ma langue ». Et ça donnait, en fait, ça donnait vraiment super bien et puis là il s’est dit : « Ben alors, je vais le faire en français aussi ». Et voilà, c’était juste ça, le fait de se rendre compte que ça donnait vraiment bien, alors voilà, on s’est dit « On y va ! »
Isa : Et l’accueil est bon, en plus !
Tino : Mais oui, l’accueil est bon, donc… En Belgique, oui, mais je ne sais pas ce que ça donnera aux États-Unis, on verra !
Eric : Vous allez retourner aux États-Unis ?
Tino : Non, il n’y a rien de prévu pour l’instant, rien de concret.
Isa : Je pense que ça va le faire, ça sonne un peu exotique, comme ça…
Tino : Oui, on espère, mais bon…
Isa : Sinon, à propos de l’artwork, tu sais qui l’a réalisé ?
Tino : Oui, c’est un mec de Bruges qui fait des sculptures en métal. Et Francky était passé un jour là, parce qu’il habite à Bruges, et il a vu ça, il s’est dit : « Wow, c’est quoi ça ? » et puis il est venu avec quelques photos… On avait pas mal d’idées, en fait, pour l’artwork en général, mais ça c’est resté, parce que ses sculptures sont incroyables !
Eric : Et le pied de micro, alors, c’est lui qui l’a sculpté ?
Tino : Oui, c’est le même mec. Oui, il a fait pas mal de choses aussi, en septembre on a une vidéo qui sort et il y a d’autres éléments qui vont apparaître du même sculpteur. Et entre parenthèses, la tête qu’on voit sur la pochette, c’est un tigre qui fait 150 kilos, ou même plus je pense, parce qu’il a un moteur diesel et tu le branches et c’est parti, il part tout seul.
Isa : Vous ne l’avez pas avec vous ?
Tino : Non, on ne l’a pas ici, malheureusement, je ne pense pas que les scènes l’acceptent.
Eric : 150 kilos ça fait short !
Tino : Non mais je pense que c’est même plus, tu sais, parce qu’il a un moteur et tout et si tu te mets dessus, tu pars.
Isa : Excellent ! Sinon, vous avez fait appel à Seven Antononopoulos pour tourner avec vous, est-ce qu’on peut considérer qu’il intègre le groupe de façon définitive ?
Tino : Je pense qu’il est encore trop tôt pour décider de ça. Il fait super bien son boulot, même plus que super bien, c’est un mec qui est super chouette. Non seulement c’est un musicien incroyable, mais qui est super humble aussi et on s’entend super bien avec lui et d’un autre côté, c’est bien qu’il ait compris qu’on a besoin de temps. Donc, petit à petit… Il reste avec nous de toute façon et on verra ce qui va se passer dans le futur. On a le temps.
Isa : Maintenant, on va faire un flashback : en 1990 Channel Zero a sorti une démo 4 titres en auto production, ce qui fait déjà pratiquement 25 ans de carrière…
Tino : Oh mais ça c’est chouette ! Moi je n’y étais pas, moi je suis rentré il y a cinq ans, j’ai 30 ans ! (rires) Non, mais bon…
Isa : Allez, si tu considérais ces 25 ans de carrière…
Eric : Sans compter les années d’interruption.
Tino : Ah mais ça fait plein de super souvenirs et de choses que… Je ne dis pas que je referai tout, mais… Finalement, si j’avais le même âge, je referai exactement la même chose.
Eric : S’il y a une chose que tu devais refaire, vraiment, ce serait quoi ?
Tino : Mais finalement, c’est ça que j’allais dire, je pense que je referai pratiquement tout avec Channel Zero, parce que ces premiers dix ans étaient vraiment fabuleux, en fait. On a fait plein de choses, on a tourné énormément, on a vécu plein de choses super intéressantes.
Isa : Tu as un souvenir préféré qui te revient, comme ça, là ?
Tino : Mais je crois que, justement, c’était l’Australie.
Eric : Pour moi, c’était… On en parlait en tant que jeunes qui écoutaient Channel, à l’époque, pour nous c’était LE groupe phare de la Belgique, qui était représenté aux quatre coins du monde, c’était extra.
Tino : Mais c’était aussi notre première tournée en tête d’affiche et donc voilà, tu pars en tête d’affiche et tu fais une tournée en Australie… On avait 25 ans, je pense, un truc comme ça, t’as des avions entre les concerts… Ah c’était bien, oui, c’était vraiment bien ! On a eu deux semaines de stars, voilà ! Après on est revenu en Belgique, c’était terminé ! (rires)
Isa : Justement, dans ta position, si tu devais donner un conseil aux jeunes musiciens qui veulent vivre le même genre d’aventure, qu’est-ce que tu leur dirais ?
Tino : Je vais le dire en anglais, c’est : « Never give up » ! C’est vrai, ça sonne con, mais voilà, il ne faut jamais jamais laisser tomber, toujours continuer et s’il y a une porte qui ne s’ouvre pas, essaye l’autre, continue et si tu es sûr de ce que tu fais, si tu es sûr de ce que tu as envie, eh bien vas-y, quoi !
Isa : Et en relation avec ça, qu’est-ce que tu penses, toi, aujourd’hui de la nouvelle génération Metal, de ce qu’on entend actuellement ?
Tino : Eh bien figure-toi que j’ai été pendant longtemps accroché à ma vieille génération Metal et puis ma fille, en fait, me fait découvrir la nouvelle génération et je me rends compte que, putain, il y a plein de bonnes choses ! Bon, je ne vais pas le dire, mais il y a des choses que j’aime un peu moins, mais il y a vraiment de bonnes choses aussi.
Isa : Tu as un exemple de groupe ?
Tino : Oui, je passerais peut-être pour un naze, en fait, parce que j’ai l’impression que tout le monde connaît, mais moi je ne connaissais pas, c’est Suicide Silence. Mais voilà, elle m’a fait écouter ça et j’étais vraiment sur le cul ! Et il y a Of Mice And Men, aussi…
Isa : Donc plutôt Metalcore ?
Tino : Oui, c’est ça.
Isa, à la fille de Tino : Quel est ton groupe préféré ?
Fille : Black Veil Brides, je pense.
Isa : Sinon, Tino, quel est le dernier CD que tu as écouté ?
Tino : Je n’écoute plus de CD, j’écoute tout en mp3 et qu’est-ce que j’ai écouté dernièrement ? Allez, disons la dernière vidéo que j’ai regardée sur Youtube, c’était Janis Joplin.
Eric : Mais c’est excellent !
Tino : Ouais, c’était « Move Over ». C’est un morceau incroyable, en fait. Et avec Francky, hier, on s’écoutait Deep Purple.
Eric : Ça n’a pas vieilli, moi je les ai vu au Hellfest, la patate !
Isa : Justement, puisqu’on parle de musique, si tu devais prendre cinq albums avec toi sur une île déserte…
Tino : Cinq albums… Je prendrai le « Rock For Light » de Bad Brains. Je prendrai le « Raining Blood » de Slayer. Je prendrai, franchement, je crois que je prendrai le dernier de Channel. Encore deux ? Ah c’est vraiment trop ! Je prendrai le « Vulgar Display Of Power » de Pantera. Et puis j’en prendrai un comme ça, je ne sais pas, je verrai bien ce qui sort !
Isa : Au hasard, donc ?
Tino : Oui, au hasard et voilà, je tombe sur « Thriller » de Michael Jackson !
Eric : Excellent choix ! Ça me fait plaisir, en plus, parce que je suis fan aussi !
Tino : Ou Bruno Mars !
Isa : Sérieux ? C’est excellent…
Tino : Ah non, mais il tue ! Je trouve qu’artistiquement, il est terrible !
Isa : Peut-être un nouveau Michael ?!
Tino : C’est ce qu’on dit !
Isa : Sinon, tu peux nous parler des futurs projets de Channel Zero ?
Tino : Ecoute, maintenant c’est la fin des festivals d’été, il y a pas mal de petites choses qui sont en train de bouger, un peu partout dans le monde et donc maintenant on est un peu en attente, en fait, de voir qu’est-ce qui va se faire, qu’est-ce qui est possible ? Et maintenant c’est le boulot des managers…
Isa : L’impression que j’ai, c’est que vous prenez à chaque fois le temps de poser les choses, de prendre votre temps, non ?
Tino : En fait ce qu’il y a, c’est qu’on a appris maintenant avec les années que ça ne sert à rien non plus de courir dans tous les sens et de, justement… La vie d’un groupe… Enfin, tu peux bousiller ton groupe en une semaine avec une connerie que tu fais, tu décides de partir dans cette direction-là et c’est pas la bonne, c’est foutu, quoi. Et ça, on l’a appris avec les années, on est parfois parti dans de mauvaises directions. Et donc maintenant on prend le temps, on a le temps de toute façon et on verra ce qui se passe !
Isa : D’accord, ce n’est pas plus mal comme fonctionnement.
Tino : Et puis bon, voilà, je crois qu’il y a l’âge, le fait qu’on ait tous une famille aussi, donc… Et on pense à se dire que si c’est bon on y va. Mais partir comme ça, se dire on prend un van et on va sur les routes d’Europe comme des fous pendant trois mois, non, c’est un peu plus cool quand même.
Isa : D’accord. Eh bien ici, j’arrive déjà au mot de la fin, je ne sais pas si Eric…
Eric : Oui, justement, j’ai encore une question, est-ce que vous envisagez déjà de postuler pour les fests de 2015 ?
Tino : C’est déjà en pour-parlers, oui.
Eric : Pour le Hellfest ?
Tino : Ca, je ne sais pas, mais je sais que les festivals 2015 sont déjà ”occupés” et l’Europe, en général. Et d’autres choses !
Isa : Surprise, donc !
Eric : Et comme justement Isabelle le disait, on te laisse le mot de la fin, on le laisse à Channel Zero…
Tino : Ah ça, c’est toujours fabuleux le mot de la fin ! (rires)
Isa : Et là, il nous dit : « Le-mot-de-la-fin » !
Tino : Non, je dirais simplement que, je crois que tous les quatre dans Channel Zero on espère vraiment que cet album… Je ne dirais pas que cet album marche, en fait, mais que cet album plaise aux gens et que quand les gens l’écoutent, qu’ils se disent que c’est un bon album, parce que pour nous c’est un album super important, avec tout ce qui s’est passé et c’est vraiment quelque chose qui nous tient profondément à coeur. Voilà, merci.
Isa & Eric : MerciHaut du formulaire

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